L'herpétologie de terrain, qu'est-ce que c'est ?

Souvent on me pose des questions sur mon travail, certaines personnes pensent même qu'il n'est pas possible de faire de l'herpétologie son metier. C'est pourtant bel et bien possible, même si effectivement cette branche d'activité n'est pas très développée et n'est pas lucrative.

Contexte
Le métier d'herpétologue de terrain peut être excercé dans le cadre d'un organisme de recherche comme le CNRS par exemple, dans une structure privée comme un bureau d'études, ou encore dans une association, comme c'est le cas pour moi. L'intitulé exact de mon travail est 'chargé d'études en herpétologie', ce qui signifie que je suis expert en herpétologie, et réalise de ce fait des diagnostic ou des suivis pour diverses structures qui ont besoin de données relatives à l'herpétofaune mais manquent de compétences internes. Ainsi, j'interviens en tant que conseiller technique et scientifique pour tout ce qui touche la gestion et l'aménagement des habitats des amphibiens et reptiles, le suivi d'espèces ou de réseau d'habitats, la détermination des espèces, l'évaluation du statut des espèces.

Ce travail est primorcial car toutes les espèces d'amphibiens et de reptiles en France possèdent un ou plusieurs statuts de protection (national, européen). De ce fait, leur prise en compte dans tout aménagement est obligatoire.

Les structures avec qui je collabore dans le cadre de mon travail son des institutions locales comme les conseils généraux, le conseil régional, les réserves naturelles, le conservatoire des espaces naturels, l'université de Strasbourg, les communes et les communautés de communes.

Description
Pratiquement, qu'est-ce que je fais ? Mon travail est biphasique, un peut comme le mode de vie des amphibiens! Le printemps et l'été, je suis sur le terrain où je réalise des inventaires et des suivis. C'est la phase de récolte de données. Avant cette phase, je réalise des protocoles d'études qui me permettent de cadrer mes recherches et de collecter les données de manières pertinentes par rapport à l'analyse que je veux en faire.
La prospection sur le terrain requiert plusieurs qualités. Premièrement, il faut bien entendu savoir identifier les espèces sans faille. Ensuite, il faut savoir les trouver : où et quand chercher ? Quelles techniques employer pour trouver telle ou telle espèce ?

Pour les amphibiens, les prospections commencent dès la fin de l'hiver quand les températures nocturnes atteignent ou dépassent 5°C. Durant le début du printemps, j'effectue mes prospections la nuit. Je repère les grenouilles, crapauds et tritons à l'aide d'une lampe torche, en parcourant les berges de mares et en marchant sur les chemins lors des soirées pluvieuses. En général, j'arrive à déterminer les individus à vue. Quand j'ai un doute, je capture l'animal et regarde les critères qui me permettent de le déterminer. J'emporte toujours mon appareil photo sur moi pour garder des documents iconographiques de mes observations.


Photographie d'un pélobate brun la nuit

Ces photographies sont précieuses car elles permettent de partager mes obsrvations avec d'autres herpétologues, et d'échanger des avis. De plus, certaines espèces ou individus sont très intéressants, et il est important de garder une trace visuelle des observation, pour les comités d'homologation par exemple. J'écoute les chants des anoures pour reconnaître les espèces. J'estime la taille des populations de grenouilles brunes en comptant les pontes qui sont déposées dans les mares.

Plus tard en saison, je continue les prospections nocturnes, que je couple avec des prospections diurnes, car certaines espèces comme le sonneur à ventre jaune sont repérables le jour.


Recherche d'amphibiens dans une mare en journée


De plus, en journée, je peux plus facilement capturer et déterminer les têtards. Je ne garde jamais d'animaux, je les captures uniquement pour la détermination et les relâche quelques minutes après sur le lieux exact de la capture. Etant donné que toutes les espèces sont protégées, je fais une demande d'autorisation de capture temporaire sur le terrain auprès des préfectures des départements dans lesquels je travaille.

Pour les reptiles, les prospections se font de jour de mars à octobre, avec un préférence pour les mois d'avril et de mai. Je repère aussi les individus à vue, et parfois il m'est arrivé dans le cadre d'études bien particulières de recourrir à la méthode des 'plaques'.


Relevé d'une plaque d'onduline

Cette méthode de piégeage passif consiste à disposer des plaques ondulées sur des zones précisément choisies au début du printemps, et de retourner les soulever plus tard en saison pour vérifier si des reptiles (et notamment de serpents) ne se sont pas réfugiés dessous. C'est un excellent moyen pour détecter des reptiles discrets comme l'orvet ou la coronelle lisse.

Sinon, j'utilise aussi la technique de recherche active, qui consiste à scruter le moindre cm2 dans les biotopes favorables afin de repérer les reptiles.


Recherche de reptiles le long d'un mur de pierre

Lorsque les prospection sont réalisées tôt le matin, il est possible d'approcher de très près les lézards en thermorégulation pour prendre des photos :


Photographie d'un lézard des souches à l'approche